
La blanquette de veau

Souvenir de famille
Un savoureux plat de ménage, héritage précieux du meilleur de la cuisine familiale. L'un des préférés des Français, célébré par les gastronomes et cuisiné par les plus grands chefs. Son petit nom de blanquette est une sorte de surnom affectueux dérivé de "blanc". Dès l'origine il s'agit bien "d'un ragoût de viandes blanches à la sauce blanche" : la première recette, écrite par le cuisinier Vincent de la Chapelle en 1735, décrit l'art d'accommoder les restes de rôti de longe de veau en sauce blanche.
La blanquette de veau est un mets à la fois simple et complexe à préparer. Fin et réconfortant, il demande au dernier moment un vrai tour de main en cuisine. Chefs et gastronomes, les plus grands s'y sont intéressés. On la retrouve dans tous les livres de cuisine qui ont fondé notre patrimoine gourmand : en 1870, le chef parisien Jules Gouffé la décrit déjà. Son Livre de cuisine prépare le bouillon de viande de veau, sa liaison au roux blanc et au jaune d'œuf, sa belle sauce nappante tels que nous les connaissons.
Héritage gourmand
La recette de la blanquette de veau a traversé les siècles sur les mêmes bases. Un bouillon haut en saveurs qui mouille à hauteur et à froid des cubes de viande de veau crue (mélange de morceaux maigres et gras). On écume avec patience 1/2 heure, avant d'y ajouter carottes, oignon piqué d'un clou de girofle, blanc de poireau et bouquet garni. On laisse mijoter à petit feu et à découvert pendant au moins une heure. La viande doit rester ferme et moelleuse, le bouillon concentré.
Un trait de génie
De la Bonne cuisine de Madame Saint-Ange (1927) à la recette du chef très contemporain Jean-François Piège, l'accompagnement de la blanquette est fait de champignons de Paris et de petits oignons grelots glacés.
Le roux blanc qui sert à monter la sauce de la blanquette est une des grandes bases de la cuisine classique : dans une casserole à fond épais et à contenance adaptée à la quantité de sauce, on fait un rapide mélange de beurre et de farine à proportions à peu près égales. On chauffe à feu doux une à deux minutes jusqu'à ce que le mélange devienne mousseux. On lui fait prendre une légère coloration avant d'y ajouter hors du feu l'odorant bouillon de veau filtré. On délaye au fouet et on remet à feu doux en remuant jusqu'à épaississement avec une cuiller en bois.
Liaisons dangereuses
En version originale, la sauce blanche est ensuite liée à la mie de pain et déjà au jaune d'œuf, puis assaisonnée d'amandes et d'épices. La liaison au jaune d'œuf est l'ajout qui donne son onctuosité à la blanquette. C'est l'instant délicat, le petit côté "happening" de la blanquette : une fois les jaunes d'œuf incorporés, le moindre bouillon superflu peut faire tourner la sauce. En touche finale, une pointe d'acidité est bienvenue. C'est une constante de la recette : à l'origine un trait de verjus, remplacé aujourd'hui par un filet de vinaigre ou de citron.
Pas si ancienne que ça La recette, annoncée comme ancienne, est toujours valable mais plus récente qu'on ne le croit. Pour que la viande de la blanquette soit parfaitement blanche, on mettait à l'origine les morceaux à dégorger dans de l'eau citronnée. Depuis Jules Gouffé et Madame Saint-Ange au 19ème siècle, on les frotte de jus de citron avant de les recouvrir d'eau. C'est toujours valable pour tous leurs successeurs.
Petite astuce pratique
Pour encore plus de gourmandise et d'onctuosité, certains ajoutent au dernier moment une cuillerée de crème fraîche.